Travailler en refuge, c'est réveiller par sa simple présence toute la population canine qui s'y trouve en arrivant le matin. C'est aussi plonger tout ce beau monde dans un silence lugubre en fermant le soir...
Travailler en refuge, c'est prendre soin des chiens, nettoyer les boxes, gérer les adoptants et les nouveaux venus canins... L'été, c'est aussi vérifier x fois par jour que les chiens aient bien toujours de l'eau. L'hiver, c'est casser la glace dans les gamelles d'eau. Travailler en refuge, c'est recueillir les chiens de personnes qui ne peuvent sincèrement plus les assumer, et c'est un crève-cœur. Mais c'est aussi récupérer les chiens de personnes qui s'en foutent, du jeune couple qui n'a plus le temps maintenant qu'un enfant a agrandi le foyer, au couple de personnes âgées pour qui le chiot de grande taille est trop lourd à gérer, en passant par ceux qui ont pris un chien comme on achèterait une déco d'intérieur... Travailler en refuge c'est rencontrer de pauvres chiens, ceux qui n'ont pas connu l'humain sous son bon jour, ceux qui n'ont pas reçu les soins, la nourriture, l'eau nécessaire à leur survie, ceux qui n'ont pas été socialisés et qui doivent jour après jour affronter le quotidien. Travailler en refuge, c'est soigner les bobos, les malades, les vieux, les rachitiques, les cassés, les traumatisés, les excités, les brutes,... et tenter de leur montrer que la vie peut être un peu plus chouette. Travailler en refuge, c'est se heurter à des adoptants potentiels qui pensent mieux connaître ces chiens que vous. Qui pensent que parce qu'ils font la démarche d'adopter, on leur doit tout. Et qui pourtant seraient les premiers à ramener le chien au bout d'une semaine parce qu'il n'est pas propre, parce qu'il fait des dégâts, parce qu'il perd ses poils, parce que, parce que... Mais c'est aussi faire parfois des concessions sur les placements, pour laisser sa chance à un chien dans des conditions qui semblent acceptables, en espérant que tout se passera bien... Travailler en refuge, c'est voir des chiens revenir après adoptions, alors que la famille humaine semblait formidable. Et aussi ne plus avoir de nouvelles de chiens qu'on a soigné au quotidien. Travailler en refuge, c'est aussi faire face à la maltraitance éducative ordinaire, celle qui est omniprésente, par méconnaissance des chiens, de leurs besoins et de leurs modes d'apprentissage. Et aussi faire face à l'impatience des adoptants face aux difficultés qu'ils peuvent rencontrer une fois le chien chez eux. Travailler en refuge, c'est prendre la mesure des incroyables capacités d'adaptation des chiens qui y vivent. Mais c'est aussi demander pardon à ceux qui ne supportent pas ou plus le box... Travailler en refuge, c'est avant tout aimer les chiens, vouloir faire le maximum pour eux, en acceptant que ça ne sera jamais suffisant, qu'ils n'auront pas tous l'attention qu'ils méritent et dont ils auraient besoin. Travailler en refuge, c'est rencontrer une formidable équipe de bénévoles mais aussi de salariés (trop souvent oubliés) qui font leur maximum pour rendre le quotidien de ces chiens un peu plus agréable. Travailler en refuge, c'est parfois s'accorder quelques secondes pour regarder un chien partir sereinement avec ses adoptants, en sentant les prémices d'un lien qui se tisse, profiter de la beauté de ce moment, de la chance qu'aura celui-là de connaître ce qu'on espère être alors un doux foyer. Et s'accrocher à ça de toutes ses forces, parce que c'est pour ça qu'on est là, que toute cette folie prend un sens... Travailler en refuge, c'est incroyablement enrichissant, sur tous les plans : humains, canins, professionnels,... On essaye de se blinder, on craque, on se blinde à nouveau. On apprend à mieux se connaître. Et on y perd également un petit peu... un peu de sa naïveté, un petit peu d'espoir, un petit peu de sa bienveillance envers l'humain,... un petit peu de soi en fait. Merci aux chiens, d'être ce qu'ils sont, de nous pardonner autant, de nous rappeler à l'ordre parfois, de nous apprendre sans cesse. Tous ces chiens qui m'ont tant marqué et dont pourtant, pour une bonne partie, j'ai oublié le nom... Merci à mes ex-collègues d'avoir été là, chacun à sa manière, pour que cette expérience reste belle. Vous êtes top, des personnes autant dévouées à la cause animale, je n'avais pas eu la chance d'en rencontrer autant, avant. Du fond du cœur, merci pour tout.
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réflexions caninesVous trouverez ici différents billets autour de la relation entre humains et chiens. Bonne lecture Archives
Janvier 2023
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